QUI EST L’AUTEURICE ? LA VOIX OU LA PLUME ?

Mais qui est l’auteur·ice d’une biographie privée ?

Quand on transforme une histoire imaginaire, vécue ou entendue en ouvrage littéraire au sens le plus large du terme, il semble évident qu’on en est l’auteur·ice. Pourtant, dans le cas d’une biographie privée, la question se pose :

Qui en est l’auteur·ice ?

Est-ce la personne qui raconte sa propre histoire ou celle qui l’écrit ? Est-ce celle qui apporte la matière ou celle qui la met en forme ?

Pour moi, la réponse est claire. L’auteur·ice de la biographie est celle ou celui qui ressent le besoin de partager sa vie, d’en faire un livre. 

En tant que biographe privée, je n’en suis, au mieux, que la co-autrice.

Mais alors, pourquoi ne pas parler d’autobiographie ? 

C’est là toute la beauté de la chose. L’autobiographe se débrouille seul·e avec ses souvenirs, sa chronologie, son style, sa manière. L’écriture même fait partie, pour l’autobiographe, de la matière qu’iel souhaite transmettre.

L’auteur·ice de la biographie privée choisit ses souvenirs, transmet ses valeurs, raconte, fait entendre sa voix. Mais une tierce personne organise son récit, transpose sa parlure en écriture sans intervenir autrement que par sa plume. Cette tierce personne c’est moi, sa biographe privée. 

Le mot « privée » a toute son importance ici. 

Il ne signifie pas que je suis privée de dessert (ça me ferait mal), mais il me distingue des biographes (tout court) qui s’attellent à la vie des personnes illustres. Faisant souvent œuvre d’historien·ne, chaque biographe a une volonté, une intention en entreprenant de retracer le parcours de son personnage. Chaque biographe apparaît dans son œuvre, par le choix des éléments mis en relief, par l’éclairage apporté sur cette vie qui n’est pas la sienne mais dont iel propose une interprétation. Son récit se fait d’ailleurs à la troisième personne.

Les biographies privées sont à la première personne. Ce « je » est celui du narrateur, de la narratrice et aussi celui de l’auteur, de l’autrice.

Une plume n’a pas besoin de pronom personnel.